La technologie actuelle permet aux compagnies aériennes de mieux contrôler leurs paramètres de vols, bénéficiant par son efficacité les voyageurs. La sécurité s’en trouve renforcée et les prix en général, par la concurrence entre compagnies ont une tendance vers la baisse. De plus en plus de voyageurs peuvent ainsi se déplacer et se rendre vers des destinations lointaines et exotiques. Nous savons aussi que cet accroissement de passagers et de touristes apporte de graves complications pour de nombreux sites qui se trouvent alors surchargés.
Un autre problème semble se développer au sein des compagnies aériennes : la contraction des vols, que de nombreux passagers constatent à la dernière minute.
Dans des bureaux de surveillance des vols (réservations, capacités de vols, prévisions) dont dispose chaque compagnie aérienne, il est possible, grâce à de puissants logiciels de prévoir le nombre de passagers sur chaque vol. Lorsque je travaillais avec Air France dans le cadre de la classe franco-américaine pour faire voyager nos milliers d’enfants français de 10 ans de la France vers les Etats-Unis et vice versa les enfants américains de l’Amérique vers la France, je me rendais dans les bureaux d’Air France au John Hancock à Chicago, ville où se trouvait notre siège social. Là, Dennis m’attendait pour parler réservations. Le départ et retour des classes n’étaient pas des jours obligatoirement fixes car les enfants pouvaient partir n’importe quel jour en dehors des dates de vacances. C’était un programme scolaire qui avait toujours lieu pendant l’année scolaire.
Dennis, déjà en 1975, pouvait voir sur son écran les réservations et les prévisions de vols pour toutes les saisons. Comme nos enfants voyageaient en dehors des weekends et des dates ultra chargées, il était facile de caser une classe ( 30 passagers) ou deux ( 60 passagers) sur des vols qui s’avéraient quasiment vides. Sur un Boeing 747 Chicago-Paris où l’on avait deux mois avant le départ, trente passagers réservés fermes, pas de problème d’y mettre jusqu’à 3 classes, environ 90 passagers. Le prix de la place était évidemment des plus bas, frisant dans les années 80, 120 dollars aller et retour. Nous étions, Air France et notre association, gagnants.
Ce système devint systématique chez toutes les compagnies pour vendre des blocs de sièges à des organismes comme Expedia, Kayak ou E Bookers. Grand nombre et prix bas.
Mais un autre processus apparaît au détriment des passagers : la contraction des vols. L’exemple est apparu dans toute sa splendeur avec dernièrement des vols sur Royal Air Maroc. Si la compagnie a deux vols dans la journée et qu’il apparaît que le nombre de sièges réservés est en dessous d’une tolérance et d’une rentabilité, le vol est alors annulé et combiné en un seul vol de la journée. L’un d’eux est alors tout simplement annulé. La raison donnée est une panne technique qui cloue l’avion au sol. De plus comme la communication est rapide et immédiate un SMS est envoyé aux passagers pour les informer de l’annulation d’un vol et qu’ils ont été mis sur un autre vol. Le tour est joué : économie d’un vol, diminution de la dépense en carburant, en personnel et en frais de stationnement. La compagnie y gagne gros sans pour autant compenser les passagers qui souvent ne connaissent pas les règlements d’annulation.
Une autre façon d’opérer est aussi efficace et cette méthode a été appliquée à nouveau par Royal Air Maroc.
Cette compagnie a tous les jours deux vols de Marrakech, l’un vers Bordeaux et l’autre vers Marseille. Ce jour-là, les deux vols étaient loin d’être complets. Royal Air Maroc décida alors de regrouper les passagers sur un seul départ. Le vol devint Marrakech- Marseille avec escale à Bordeaux. Le vol devint deux fois plus long. Au lieu du vol direct Marrakech-Marseille direct, en général plus cher, il se transforma en Marrakech-Marseille avec escale à Bordeaux. Mêmes économies : un vol en moins avec gain sur le carburant et le personnel.
Quelques jours plus tôt c’était le vol Marrakech-Marseille détourné sur Toulouse. Les passagers du direct Bordeaux Marrakech durent faire le détour par Marseille.
Si cet exemple est flagrant, dans de nombreux pays, il devient de plus en plus fréquent. Comme la plupart des passagers ignorent les règlements qui s’appliquent aux incidents créés par les compagnies aériennes, c’est tout bénéfice pour la compagnie.
Lorsque je soulevai le problème avec Royal Air Maroc comme je le fais toutes les fois avec n’importe quelle compagnie, la réponse est la même comme l’indique celle de Royal Air Maroc :
Nous avons bien reçu votre courrier et nous sommes désolés pour les désagréments éventuellement subis. Nous vous assurons de notre engagement à mener les investigations nécessaires et à apporter une réponse appropriée à votre requête, dans un délai moyen de 40 jours ouvrables.
Pour nous aider à traiter plus rapidement vos requêtes, nous vous prions de reprendre dans vos prochains courriels la référence indiquée en objet et nous les transmettre à l’adresse: serviceclientele@royalairmaroc.com, ainsi que tout document qui peut être considéré comme justificatif de voyage. Nous pouvons avoir aussi besoin de votre Relevé d’identité Bancaire pour les cas qui ouvrent le droit à un remboursement en numéraire.
Des originaux de documents sont nécessaires dans certains cas tels que :
– Une procuration avec signature légalisée en cas de délégation à une personne tierce autre que le client passager
– Les factures de frais encourus…
Ces documents doivent être adressés par courrier postal en reprenant la référence indiquée en objet à :
Royal Air Maroc
Service Réclamations Clients
Aéroport casa-Anfa
Casablanca – Maroc
La compagnie offre ainsi la possibilité de recevoir « un remboursement en numéraire ». Le client est satisfait de sa démarche et ne poursuit pas plus avant sa curiosité. Mais uniquement le passager qui s’est plaint recevra une telle réponse.
Aux Etats-Unis, la réglementation est appliquée avec beaucoup plus de rigueur mais encore en faut-il en faire la demande. Une compensation de 150 dollars à plus de 300 dollars peut être reçue par les passagers.
Cet article est un avertissement pour tous les passagers : vous avez des droits vis à vis de toute compagnie aérienne. Et tout incident, retard prolongé, changement d’itinéraire, annulation de vols donne droit à des compensations bien établies. Malheureusement l’Europe est très laxiste concernant ces droits. Quant aux pays en voie de développement même si la compagnie a signé un accord avec l’IATA, les droits des passagers sont bafoués.
Enfin pour terminer, l’incident qui suit n’est plus possible heureusement. J’en ai été le témoin direct. Dans mes accords avec Air France, je voyageais en première classe sur les vols Air France. Je m’apprêtais à rentrer à Paris de Miami. Les passagers première étaient installés quand une hôtesse vint prévenir deux passagers première avec billet à tarif plein qu’ils étaient transférer en classe économie. Ils seraient évidemment remboursés de la différence. Le vol première était complet. Les deux passagers étonnés acceptèrent de passer à l’arrière du Boeing 747.
C’est sur l’ordre du commandant de bord que l’opération se fit. Il avait besoin de ces deux sièges pour des GP ( billets réduits ou gratuits). Ces GP étaient sa femme et sa fille !
Je ne connais pas la suite de cette affaire, l’ayant pourtant signalé aux services Air France. Les passagers ont dû être dédommagés, je l’espère.
[NB : Cette étude est parue dans le livre « Tourisme de destruction massive » ( L’Harmattan) paru en 2011.]