fanatismo

Souvenirs de Santiago : le prédicateur fanatique de la Calle Huerfano

Phénomène d’envergure dans toute l’Amérique latine, la poussée des sectes évangéliques est constatable à la prolifération d’églises qui gangrènent les territoires et divisent les populations. Catherine Maillary, qui a vécu près de 10 ans au Chili, se souvient d’un de ces prédicateurs de rue qu’elle croisait à Santiago…

Debout au coin de cette rue piétonne, probablement la plus empruntée de Santiago, endimanchés de noir et de blanc dans leur costumes étriqués et usés, gesticulent et brament les prédicateurs évangélistes en brandissant leur Bible, jetant des menaces, sermons et codes de bonne conduite, pèle-mêle aux passants tantôt indifférents et tantôt amuses, quelques-uns excédés, ou tantôt même s’arrêtant pour mieux écouter leur paroles interminables.

Je me souviens plus particulièrement d’un d’eux plus virulent que les autres qui bramait sans relâche des « La mujer adultera!!!! » (« la femme adultère »), suivi d’une flopée de menaces et paroles dépréciatives en tout genre, le tout accompagné d’un rictus de profonde détresse teintée de dégoût pour le monstre en question.

predicador

Je me rendais à l’époque sur mon lieu de travail, il était tôt le matin et, autour de moi, les regards embués de la foule aux pas pressés tombaient sur ce petit homme au pantalon trop court et au col amidonné, lui donnant un air de digne misère. Il gesticulait, montait et descendait nerveusement d’une petite caisse en bois qui lui servait d’estrade de fortune pour l’occasion. Il exhibait avec force geste les Saintes Écritures sous le nez de qui s’en approchait.

Je me souviens avoir ressenti l’ampleur de son désarroi et de sa profonde conviction, j’ai pensé qu’il avait probablement dû être victime de cette affaire lui-même… ou peut-être fut-elle celle d’un oncle, cousin, meilleur ami… Bref, le sujet paraissait lui tenir particulièrement à cœur. Il ne personnifiait plus la parole bienveillante que l’on aime à prêter au Christ, mais bel et bien celle d’un prêtre aigri et aboyeur, tout comme celui dont parle Isabel Allende dans sa Maison aux Esprits.

Bien vite mes pas m’éloignaient de cette figure évangélique de la Calle Huerfano, un matin comme beaucoup d’autres.

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